11 Janvier 2007
Cinéma Saint-André des Arts
Jean Pierre Daniel (fin de la première partie de son intervention) : S’est-on inquiété à tort, quand on a dénoncé en 2004, le démantèlement systématique du Plan «Lang-Tasca» et l’annonce de la disparition de l’éducation artistique dans le projet de refondation des programmes de l’école autour d’un socle commun de connaissances ?
La mobilisation très large, essentiellement parmi les acteurs du théâtre de la danse et de la musique, il faut le reconnaître, qui s’est exprimée au théâtre du Rond-point le 15 décembre 2004 « pour la présence régulière des arts et des artistes à l’école » a donné naissance au Forum permanent de l’éducation artistique et à l’adoption et la publication d’un « Manifeste d’intérêt général pour une politique d’éducation artistique durable et concertée »
Je vous propose que nous nous remémorions les mots de ce manifeste, lu en Avignon en juillet 2005 dans la Maison Jean Vilar.
Je passe la parole à Robin Renucci qui, à lui seul, incarne tout ce que l’on cherche aujourd’hui à défendre et qui participe aux travaux du Forum.
Sa présence est aussi la preuve de la nécessaire liaison entre tous les arts.
Robin Renucci : Je suis heureux de retrouver nombre d’entre vous que j’ai croisés, sur tout le territoire, dans les salles pour certains ou dans le cadre de leurs associations, en allant proposer, tout au long de cette année, des rencontres avec mon film.
Je suis très soucieux du lien qu’il faut établir dans le travail de l’action culturelle, avec tous ceux qui interviennent dans le cadre du bénévolat et ne sont pas présents ici, qui sont aussi souvent ailleurs que dans le champ sectoriel du cinéma.
Il me semble essentiel aussi que nous conjuguions nos efforts avec l’action culturelle théâtrale, avec le corps des enseignants qui ont un travail si difficile à faire et qui, pour la plupart d’entre eux, vont partir à la retraite dans les prochains mois et qui ne seront pas remplacés, ou qui le seront par des jeunes gens qui n’auront pas connu l’éducation culturelle que nous avons pu connaître à l’école.
Ce lien, ce partenariat de plus en plus difficile à assurer entre les artistes et le champ éducatif, ces liens qui ont été extrêmement puissants dans l’éducation populaire mise en œuvre par le ministère de la Jeunesse et des sports, s’effritent jour après jours.
Il y a une obligation d’action aujourd’hui, là ou on se trouve, sur notre territoire. Il ne faut pas se lamenter, ne pas prier, mais agir autant que l’on peut, comme vous le faites évidemment, comme nous tentons de le faire les uns et les autres, en engendrant des actions les plus concrètes possible avec tous ces partenaires.
Donc le Forum, tu l’as dit, Jean-Pierre…
Je vais vous citer quelques lignes claires du Manifeste, sans être long …
(Les phrases en gras italique sont extraites du Manifeste)
Ce que nous dénonçons c’est :
On voit bien, chaque fois, que derrière les mots, nous ne reconnaissons pas les actes. Nous forgeons un dictionnaire commun à partir de nos actes. Nous sommes peut-être en train de faire une erreur, fondamentale, en créant des mots qui sont repris. Nous retrouvons nos termes, exactement les mêmes, dans les mêmes acceptions, totalement détournés par une pensée fondamentalement différente de la nôtre…
De même les évaluations. On a progressivement confondu, au ministère de la Culture, les évaluations de pratiques culturelles et les évaluations de pratiques artistiques. Ce n’est pas la même chose de pratiquer un art ou d'avoir une action créative, que de s’acheter un Ipod, un walkman, de regarder la télévision, ou même d’aller dans des salles de cinéma qui proposent des formes de cinéma loin de pratiques artistiques …
Donc, ces écarts entre les paroles et les actes, à dénoncer !
Face à une vision réductrice et normalisatrice de la réussite scolaire, nous voulons que l’éducation de nos enfants réconcilie et valorise toutes les formes d’intelligence.
Face aux assauts quotidiens de la marchandisation, nous voulons que nos enfants apprennent à distinguer une œuvre d’un produit.
C’est vrai que sur la même étagère, on a en même temps un film qui sort à 49 copies voir à 50 copies, voire à 10 où 15 copies, vous le savez avec le boulot d’action culturelle que vous faites derrière. Et Shrek et ses 900 copies ? comment rivaliser ?
Comme on l’évoquait tout à l’heure, il y a des produits et puis il y a des œuvres qui ne proposent pas la même émancipation, tout simplement. On ne cherche pas la même chose…
Dans une société du divertissement et de la médiatisation, nous voulons que nos enfants aient toujours le choix des arts et de la culture.
Dans une société fragmentée comme la nôtre, nous voulons que la diversité des esthétiques et des pratiques soit une chance et une arme contre les déterminismes.
Nous affirmons que le chantier de l’éducation artistique est réellement doit être une priorité nationale.
Mais de quelle éducation artistique parlons-nous ?
Celle que nous voulons implique :
* La fréquentation des œuvres
* La pratique d’un art
C’est pour cela qu’il ne faut pas se désolidariser du théâtre. c’est essentiel je vous assure. Il y a cet écart, je le vois, entre les théâtreux et la profession du cinéma qui est réunie aujourd’hui. C’est pourtant la même création, la même singularité, c’est la même recherche de l’inconnu. Le cinéma est rangé dans le monde du connu. Ses représentations du monde ne sont plus symboliques. C’est au théâtre aujourd’hui, comme dans un certain cinéma de création, que l’on retrouve cet enchantement du monde et cette volonté de créer du monde symbolique.
Le bras frappeur aujourd’hui, c’est le monde symbolique qu’il touche !
* La rencontre des artistes, des techniciens et d’artisans
C’est très important !
Nous affirmons que l’éducation artistique conjugue nécessairement un projet pédagogique, un projet artistique et un projet culturel dans un cadre éducatif partagé.
Sa mise en œuvre concerne tous les professionnels et les acteurs des métiers de l’éducation…
* La dynamique de projet
Il faut que tous les établissements scolaires aient une possibilité d’avoir un vrai projet pédagogique autour de la création, de l’écriture, du cinéma, de l’art dramatique.
* Les partenariats, dans le respect des singularités de chaque partenaire.
* Le croisement des expériences.
Je vous cite tout ce que nous voulons et ce que vous voulez aussi, je le pense…
Parce que l’éducation artistique n’est toujours pas accessible à tous, nous exigeons qu’elle soit au cœur d’un projet national d’éducation garanti par les politiques publiques…
…et les politiques territoriales.
Dans le transfert des compétences aux régions, c’est là que l’on va prendre un gros mur puisque : oui l’Etat se désengage ! mais comment allons nous, nous retourner auprès des collectivités territoriales ?
On est peut-être moins sensible en Ile de France à cette question, que beaucoup d’entre vous, qui êtes en régions, et qui savez à quel point c’est votre Conseil Général ou votre Conseil Régional qui vous aide ?
Nous voulons que soit garantie la place de l’artiste, dans les projets d’éducation artistique.
Il faut dénoncer à quel point elle est remise en question aujourd’hui, vous le savez !
Enfin, l’éducation artistique met en présence des artistes, des éducateurs, des enseignants ou des animateurs qui doivent tous bénéficier de formations communes pour optimiser leur partenariat.
Cette question de la formation, c’est celle de la poule et de l’œuf, le point de départ et c’est pourquoi le Forum pour l’éducation artistique s’est mobilisé de cette façon, grâce à vous, avec vous. Voilà, continuons.
Cinéma Saint-André des Arts
Intervention de Robin Renucci, au nom du Forum permanent de l’éducation artistique, dans le cadre de l’intervention de Jean Pierre Daniel, président des Enfants de cinéma sur les rapports de l’éducation artistique et l’action culturelle
Jean Pierre Daniel (fin de la première partie de son intervention) : S’est-on inquiété à tort, quand on a dénoncé en 2004, le démantèlement systématique du Plan «Lang-Tasca» et l’annonce de la disparition de l’éducation artistique dans le projet de refondation des programmes de l’école autour d’un socle commun de connaissances ?
La mobilisation très large, essentiellement parmi les acteurs du théâtre de la danse et de la musique, il faut le reconnaître, qui s’est exprimée au théâtre du Rond-point le 15 décembre 2004 « pour la présence régulière des arts et des artistes à l’école » a donné naissance au Forum permanent de l’éducation artistique et à l’adoption et la publication d’un « Manifeste d’intérêt général pour une politique d’éducation artistique durable et concertée »
Je vous propose que nous nous remémorions les mots de ce manifeste, lu en Avignon en juillet 2005 dans la Maison Jean Vilar.
Je passe la parole à Robin Renucci qui, à lui seul, incarne tout ce que l’on cherche aujourd’hui à défendre et qui participe aux travaux du Forum.
Sa présence est aussi la preuve de la nécessaire liaison entre tous les arts.
Robin Renucci : Je suis heureux de retrouver nombre d’entre vous que j’ai croisés, sur tout le territoire, dans les salles pour certains ou dans le cadre de leurs associations, en allant proposer, tout au long de cette année, des rencontres avec mon film.
Je suis très soucieux du lien qu’il faut établir dans le travail de l’action culturelle, avec tous ceux qui interviennent dans le cadre du bénévolat et ne sont pas présents ici, qui sont aussi souvent ailleurs que dans le champ sectoriel du cinéma.
Il me semble essentiel aussi que nous conjuguions nos efforts avec l’action culturelle théâtrale, avec le corps des enseignants qui ont un travail si difficile à faire et qui, pour la plupart d’entre eux, vont partir à la retraite dans les prochains mois et qui ne seront pas remplacés, ou qui le seront par des jeunes gens qui n’auront pas connu l’éducation culturelle que nous avons pu connaître à l’école.
Ce lien, ce partenariat de plus en plus difficile à assurer entre les artistes et le champ éducatif, ces liens qui ont été extrêmement puissants dans l’éducation populaire mise en œuvre par le ministère de la Jeunesse et des sports, s’effritent jour après jours.
Il y a une obligation d’action aujourd’hui, là ou on se trouve, sur notre territoire. Il ne faut pas se lamenter, ne pas prier, mais agir autant que l’on peut, comme vous le faites évidemment, comme nous tentons de le faire les uns et les autres, en engendrant des actions les plus concrètes possible avec tous ces partenaires.
Donc le Forum, tu l’as dit, Jean-Pierre…
Je vais vous citer quelques lignes claires du Manifeste, sans être long …
(Les phrases en gras italique sont extraites du Manifeste)
Ce que nous dénonçons c’est :
La discontinuité de l’action de l’état au gré des alternances démocratiques ;
l’érosion des budgets, qui sont consacrés aux arts et à la culture dans leur dimension éducative ;
les écarts, en somme, entre les paroles et les actes.
l’érosion des budgets, qui sont consacrés aux arts et à la culture dans leur dimension éducative ;
les écarts, en somme, entre les paroles et les actes.
On voit bien, chaque fois, que derrière les mots, nous ne reconnaissons pas les actes. Nous forgeons un dictionnaire commun à partir de nos actes. Nous sommes peut-être en train de faire une erreur, fondamentale, en créant des mots qui sont repris. Nous retrouvons nos termes, exactement les mêmes, dans les mêmes acceptions, totalement détournés par une pensée fondamentalement différente de la nôtre…
De même les évaluations. On a progressivement confondu, au ministère de la Culture, les évaluations de pratiques culturelles et les évaluations de pratiques artistiques. Ce n’est pas la même chose de pratiquer un art ou d'avoir une action créative, que de s’acheter un Ipod, un walkman, de regarder la télévision, ou même d’aller dans des salles de cinéma qui proposent des formes de cinéma loin de pratiques artistiques …
Donc, ces écarts entre les paroles et les actes, à dénoncer !
Face à une vision réductrice et normalisatrice de la réussite scolaire, nous voulons que l’éducation de nos enfants réconcilie et valorise toutes les formes d’intelligence.
Face aux assauts quotidiens de la marchandisation, nous voulons que nos enfants apprennent à distinguer une œuvre d’un produit.
C’est vrai que sur la même étagère, on a en même temps un film qui sort à 49 copies voir à 50 copies, voire à 10 où 15 copies, vous le savez avec le boulot d’action culturelle que vous faites derrière. Et Shrek et ses 900 copies ? comment rivaliser ?
Comme on l’évoquait tout à l’heure, il y a des produits et puis il y a des œuvres qui ne proposent pas la même émancipation, tout simplement. On ne cherche pas la même chose…
Dans une société du divertissement et de la médiatisation, nous voulons que nos enfants aient toujours le choix des arts et de la culture.
Dans une société fragmentée comme la nôtre, nous voulons que la diversité des esthétiques et des pratiques soit une chance et une arme contre les déterminismes.
Nous affirmons que le chantier de l’éducation artistique est réellement doit être une priorité nationale.
Mais de quelle éducation artistique parlons-nous ?
Celle que nous voulons implique :
* La fréquentation des œuvres
* La pratique d’un art
C’est pour cela qu’il ne faut pas se désolidariser du théâtre. c’est essentiel je vous assure. Il y a cet écart, je le vois, entre les théâtreux et la profession du cinéma qui est réunie aujourd’hui. C’est pourtant la même création, la même singularité, c’est la même recherche de l’inconnu. Le cinéma est rangé dans le monde du connu. Ses représentations du monde ne sont plus symboliques. C’est au théâtre aujourd’hui, comme dans un certain cinéma de création, que l’on retrouve cet enchantement du monde et cette volonté de créer du monde symbolique.
Le bras frappeur aujourd’hui, c’est le monde symbolique qu’il touche !
* La rencontre des artistes, des techniciens et d’artisans
C’est très important !
Nous affirmons que l’éducation artistique conjugue nécessairement un projet pédagogique, un projet artistique et un projet culturel dans un cadre éducatif partagé.
Sa mise en œuvre concerne tous les professionnels et les acteurs des métiers de l’éducation…
* La dynamique de projet
Il faut que tous les établissements scolaires aient une possibilité d’avoir un vrai projet pédagogique autour de la création, de l’écriture, du cinéma, de l’art dramatique.
* Les partenariats, dans le respect des singularités de chaque partenaire.
* Le croisement des expériences.
Je vous cite tout ce que nous voulons et ce que vous voulez aussi, je le pense…
Parce que l’éducation artistique n’est toujours pas accessible à tous, nous exigeons qu’elle soit au cœur d’un projet national d’éducation garanti par les politiques publiques…
…et les politiques territoriales.
Dans le transfert des compétences aux régions, c’est là que l’on va prendre un gros mur puisque : oui l’Etat se désengage ! mais comment allons nous, nous retourner auprès des collectivités territoriales ?
On est peut-être moins sensible en Ile de France à cette question, que beaucoup d’entre vous, qui êtes en régions, et qui savez à quel point c’est votre Conseil Général ou votre Conseil Régional qui vous aide ?
Nous voulons que soit garantie la place de l’artiste, dans les projets d’éducation artistique.
Il faut dénoncer à quel point elle est remise en question aujourd’hui, vous le savez !
Enfin, l’éducation artistique met en présence des artistes, des éducateurs, des enseignants ou des animateurs qui doivent tous bénéficier de formations communes pour optimiser leur partenariat.
Cette question de la formation, c’est celle de la poule et de l’œuf, le point de départ et c’est pourquoi le Forum pour l’éducation artistique s’est mobilisé de cette façon, grâce à vous, avec vous. Voilà, continuons.