à l'appel du collectif national de l'action culturelle et cinématographique (Blac)

lundi 14 janvier 2008

14 janvier 2008, courrier du collectif au ministre de la Culture et de la Communication

Madame la Ministre,


Plus de trois cents professionnels ont répondu présents à notre invitation et sont venus participer au débat sur la situation de l’action culturelle cinématographique, le vendredi 11 janvier.

Ils représentaient très largement tous les acteurs et les structures qui depuis maintenant près de deux mois se mobilisent à travers tout le pays contre les annonces de diminution des crédits d’Etat dévolus à leurs actions par l’intermédiaire des Drac, et ont signé l’appel que vous trouverez dans le dossier en annexe de cette lettre.

Nous avons bien évidemment rendu compte des courriers que vous-même, ainsi que Monsieur le Premier ministre, avez envoyés à plusieurs d’entre nous en réponse aux très nombreuses lettres que nous vous avons adressées pour attirer votre attention sur les conséquences dramatiques de ce désengagement. Nous avons pris acte de votre volonté de voir rétablis à l’identique de 2007 les financements de nos actions par les Drac.

Nous avons cependant noté que vous prévoyez de prendre ces financements sur la même enveloppe que celle qui a été débloquée fin décembre pour le spectacle vivant. Cette redistribution annoncée en faveur de la filière cinématographique ne permettra pas de revenir à une situation à l’identique pour les porteurs de projets. Contrairement à l’esprit de votre lettre du 8 janvier 2008, les Drac ont commencé à annoncer des baisses importantes de la participation de l’Etat, dans le meilleur des cas, pour des structures associatives ou non, dans le cadre de leurs projets d’action culturelle 2008.

Lors de notre rassemblement, nous avons rappelé aussi que nous avions déjà dénoncé, tous ensemble, l’an dernier, une baisse de crédit inquiétante. Madame Véronique Cayla, Directrice générale du CNC, nous avait reçus à cette occasion, au nom du Ministre de la Culture, en nous précisant que ces décisions étaient liées à la baisse conjoncturelle des crédits du fond de soutien, en nous rappelant à cette occasion son attachement à l’action culturelle.

Reste que, sous réserve d’autres précisions de votre part, concernant les festivals non pris en compte par le CNC, nous estimons encore à 20 % les baisses de crédits déconcentrés qui seraient enregistrées ayant pour conséquence la mise en péril de nombreuses, bien que modestes, manifestations se déroulant notamment en milieu rural.

Nous restons donc très préoccupés, et dénonçons toujours la volonté de l’Etat de se désengager concrètement du financement de l’action culturelle cinématographique dans sa dimension non-marchande.




Nous avons aussi témoigné de la très grande précarité de toute cette filière.

Les attaques des grands groupes de l’exploitation contre les initiatives des collectivités locales, leur volonté de séparer le marché porteur du cinéma de son volet culturel dans le cadre des mutations technologiques en cours, viennent renforcer cette précarité.

Seule une volonté politique forte, qui affirme la nécessité de protéger l’action culturelle de la seule logique marchande, qui revendique la responsabilité de l’Etat à travers le Ministère de la Culture comme garant de l’égalité pour tous, pourra créer les conditions d’un apaisement.

De ce point de vue, nous sommes, de même, très inquiets des projets de restructuration du ministère de la Culture et du devenir des Directions régionales (DRAC), outil de proximité indispensable dans le cadre d’un aménagement culturel du territoire.

L’annonce de la constitution prochaine d’un Conseil d’administration du CNC nous inquiète également. Quel lien restera-t-il entre cet établissement public et le ministère de la Culture ? Quelle place y tiendront les professionnels, et parmi eux, tous les acteurs de l’action culturelle ? Cette réorganisation se fera-t-elle en concertation avec l’ensemble des acteurs de la filière dont nous faisons partie ?

Le désengagement de l’Etat, que nous dénonçons, passe aussi par ces projets de « nouvelle gouvernance » qui finissent par laisser le seul marché organiser les relations des créateurs et du public.

C’est dans ce cadre, que nous affirmons notre volonté de participer à tous les moments de concertation que vous organisez, que nous demandons à être invités aux entretiens de la Rue de Valois, réservés pour l’instant, aux seuls professionnels du spectacle vivant.

Nous avons affirmé à plusieurs reprises lors de ce rassemblement notre volonté de voir le ministère de la Culture ne plus séparer le cinéma des autres arts lorsqu’il mène une réflexion collective avec ses acteurs.



Nous avons enfin, de ce point de vue, évoqué votre projet et celui du ministre de l’Education Nationale de mettre en œuvre un nouveau cadre pour l’éducation artistique.

Nous avons commencé à étudier le rapport de Monsieur Eric Gross, Inspecteur Général.

Nous avons observé avec surprise, combien ce rapport avait été élaboré sans concertation avec les acteurs de l’action culturelle cinématographique, même ceux qui sont les plus impliqués dans l’éducation artistique depuis de très longues années. Sa mise en œuvre appelle, selon nous, à une réelle réflexion collective, tant nombre de ses propositions nous semblent très éloignées de l’approche actuelle de cette action éducative. Là aussi, notre réflexion est commune aux autres arts, et nous l’avons exprimé concrètement dès 2005 dans le cadre du Forum Permanent pour l’Education Artistique (FPEA).

Nous nous sommes aussi interrogés sur le silence du Haut conseil à l’éducation artistique, mis en place il y a à peine deux ans par le précédent Président de la République et l’actuel Premier Ministre afin d’assurer le suivi de l’action publique en la matière.



Nous avons enfin souhaité, en appelant à la tenue d’États généraux de l’action Culturelle cinématographique, nous engager dans une action collective d’évaluations, de témoignages, d’analyses de toutes nature et de construction de projets, permettant une mise en valeur de notre travail et la mise au point d’un argumentaire qui représente clairement notre réalité et nos points de vue, sur la base desquels votre politique publique puisse s’appuyer pour envisager un véritable plan de relance de notre action, indispensable au rééquilibrage vital des rapports entre l’art et l’industrie.



Nous vous prions de croire, Madame la Ministre, à l’assurance de nos sentiments respectueux.




Pour le collectif national
de l'action culturelle cinématographique







En annexe du courrier
L’appel du 07 décembre 2007
La liste des signataires à jour (au 10 janvier au soir).
Le texte d’ouverture de la rencontre
Le communiqué du 11 janvier 2008 rédigé par le collectif
L’adresse de notre « site » : http://cinema-diversite-culturelle.blogspot.com